Activer le plein potentiel des femmes dans les processus de paix au Sahel
Entre 2018 et 2019, le Réseau de recherche sur les opérations de paix (ROP) a mis en œuvre le projet Activer le plein potentiel des femmes dans les processus de paix au Sahel, une initiative participant à l’effort international de mieux inclure les femmes et les perspectives de genre dans les processus de paix tel que prévu par la Résolution 1325 (2000) du Conseil de Sécurité des Nations Unies.
Conçu par la directrice du ROP, Marie-Joëlle Zahar, et financé par Affaires mondiales Canada, le projet a accompagné 27 femmes activistes des pays du Sahel (Mali, Niger, Mauritanie, Burkina Faso, Tchad) et de Côte d’Ivoire en renforçant leurs connaissances, compétences et aptitudes sur les différents aspects des processus de paix. Basé sur une théorie du changement selon laquelle le renforcement des connaissances, la mise en réseau et l’introduction des activistes à des acteurs des processus de paix locaux, nationaux et régionaux permettraient à celles-ci de participer plus activement aux efforts de (re)construire la paix, le projet consistait en une série de quatre formations se déroulant à Ouagadougou, au Burkina Faso, et un évènement de clôture à Bamako, au Mali.
De la théorie à la pratique
Le projet a permis au ROP de faire le pont entre la théorie et la pratique. Les formations, fondées sur les acquis des recherches sur la consolidation de la paix et sur les aspects genrés de ces interventions, ont permis aux participantes de se familiariser avec les résultats des recherches les plus récentes dans le domaine, d’évaluer l’utilité de ceux-ci pour leurs contextes particuliers et de réfléchir à leurs impacts pour la pratique de la consolidation de la paix.
C’est ainsi que les participantes ont (re)vu différents éléments des processus de paix dont les processus électoraux, les réformes constitutionnelles et institutionnelles, les dialogues locaux et nationaux, le désarmement, la démobilisation et la réintégration des combattants (DDR), et les réformes du secteur de la sécurité (SSR), mettant l’accent à la fois sur les dimensions genrées implicites et explicites de ces processus et sur les difficultés récurrentes auxquelles les femmes font face lorsqu’elles tentent d’y participer. Une formation pratique a couvert certaines méthodes de médiation des différents et aiguisé les compétences et habiletés des participantes en matière de communication avec les bailleurs, les médias et les médiateurs.
Des retombées parlantes
Rapidement, les participantes ont mis en pratique les connaissances, compétences ou aptitudes acquises lors des formations. La mise en réseau avec d’autres femmes les a inspirées à aborder le sujet d’actions conjointes et à tisser des liens de solidarité. Lors d’entrevues individuelles, menées dans le cadre de l’évaluation de fin de projet, la majorité d’entre elles ont affirmé avoir réalisé de nouveaux apprentissages ou approfondi leurs connaissances. Surtout, nous dit Marie-Joëlle Zahar, « la plupart d’entre elles ont souligné à quel point le projet leur avait donné confiance en elles-mêmes et en leur capacité d’agir. »
- Deux femmes ayant participé à la formation sont devenues médiatrices pour la Banque mondiale.
- Quatre ont été contactées par la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) pour rejoindre le réseau FemWise Afrique dont l’objectif est de renforcer la participation des femmes africaines dans la prévision des conflits, processus de médiation et efforts de stabilisation de la paix.
- Une autre est devenue ministre de la Promotion de la femme, de l’enfant et de la famille dans son pays.
- Plusieurs autres ont décroché des postes au sein d’agences des Nations Unies, notamment à titre de conseillères genre.
Et la suite ?
Pour les femmes impliquées, le projet n’est qu’un premier pas dans la mise en commun de leurs compétences au service de la paix. Elles ont décidé de rester en contact et poursuivent des efforts visant à se constituer en réseau régional.
Au ROP, les travaux continuent actuellement avec la conception d’un programme-cadre intitulé « Les femmes au cœur des efforts de prévention, de la gestion des conflits et de la sécurité humaine pour une paix durable, » qui bénéficie du soutien du Département fédéral des affaires étrangères de la Confédération Suisse. Ce programme, élaboré avec l’appui de la coordonnatrice de projets du ROP, Mme Caroline Saint-Mleux, vise – entre autres – l’accompagnement de femmes activistes dans le développement de leurs capacités de leadership et dans leur mise en réseau avec les acteurs responsables de l’élaboration des politiques et réponses sécuritaires dans les pays visés par l’initiative.